Ce dimanche 28 février, Donald Trump retrouve officiellement ses électeurs en prenant la parole pour la première fois depuis les évènements du 6 janvier devant la Conservative Political Motion Convention qui se déroule à Orlando en Floride.
Selon son entourage, il devrait évoquer «l’avenir du parti républicain et du mouvement conservateur». Mais pour de nombreux observateurs, cela ne fait guère de doute: ce dont devrait parler Donald Trump, c’est surtout de son avenir politique à lui.
«Imaginez, il va parler en dernier, devant tous ses rivaux possibles. Il va régler ses comptes avec ceux qui ont voté contre lui lors du deuxième procès en destitution et continuer à s’imposer résolument comme le patron du parti», détaille pour Le HuffPost, Jean-Éric Branaa, spécialiste des États-Unis, maître de conférence à l’Université Paris 2, et auteur de Joe Biden, L’homme qui doit réparer l’Amérique (Nouveau Monde).
Si les rumeurs bruissent évidemment d’une candidature Trump à la présidentielle de 2024, la route est néanmoins encore longue. Outre d’éventuels ennuis de santé ou judiciaires, elle passera forcément par une primaire. Résultat, d’ici là, moins que la course à la Maison-Blanche, c’est bel et bien sur les élections de mi-mandat du 8 novembre 2022 que l’ex-président devrait essayer de peser.
«C’est un showman, bien sûr que dimanche il sera query de son retour en politique, mais je pense qu’il va plutôt choisir de se faire désirer pour 2024, laisser planer le doute. En attendant, il sera très clair sur son intention d’influencer l’échéance de 2022 qui lui servira de tremplin», abonde Françoise Coste, professeure d’études américaines à l’université Toulouse-Jean Jaurès et spécialiste de la droite américaine et du parti républicain, contactée par Le HuffPost.
Placer ses pions pour les élections de mi-mandat
Il n’est pas query que Donald Trump se présente lui-même au scrutin qui se déroulera dans moins de deux ans, et qui verra la remise en jeu de la fragile majorité démocrate avec le renouvellement de 435 sièges à la Chambre des représentants et de 34 des 100 sièges au Sénat.
En revanche, pour Trump c’est l’event d’imposer son statut de «faiseur de roi». Depuis plusieurs semaines, le magnat de l’immobilier multiplie les rendez-vous avec les grands pontes du parti républicain, relaie Axios. Objectif: faire monter des jeunes pousses de son sérail et évincer des rivaux trop gênants à l’instar d’un Ted Cruz. «Il y a énormément de locations à prendre alors que toutes les projections montrent pour le second un basculement des deux chambres du côté des républicains. On voit bien d’ailleurs que le casting a déjà commencé avec par exemple l’ex-footballeur afro-américain Hershel Walker, soutien de Trump, pressenti pour la Géorgie», détaille Jean-Éric Branaa.
Surtout, rappellent les deux spécialistes, Donald Trump n’est pas franchement un apparatchik du parti républicain: moins l’ancien président se mêle de ses rouages en envoyant plutôt des fidèles, moins il se brûle les ailes et proceed de le dévorer par la base. Laquelle lui est toujours plus fidèle. Selon un sondage YouGov, les électeurs de Trump sont d’autant plus convaincus de son innocence dans les événements du Capitole, depuis son acquittement.
En revanche, un défi reste de taille. «Depuis le 6 janvier, Trump est privé de Twitter, il va donc falloir qu’il renouvelle sa présence médiatique en se montrant inventif. Le poids de son ombre sur le parti en dépend aussi», analyse ainsi Françoise Coste. C’est là où réside aussi pour Trump la double utilité des midterms: en s’imposant comme le marionnettiste, il redevient un membre à half entière du spectacle.
Une bonne nouvelle pour Biden?
De fait, si les échéances de mi-mandat américaines sont habituellement l’event d’un référendum sur l’motion du président en place, elles serviront aussi cette fois-ci de plébiscite pour Trump. «De toute façon, peu importe presque les résultats. Il fera comme en 2018. Il dira qu’il a gagné et reniera les candidats qui ont perdu et qu’il avait soutenus», estime Jean-Éric Branaa.
Quant au locataire actuel de la Maison-Blanche, il pourrait largement tirer parti de la state of affairs, analyse le spécialiste. «Pour Biden, un retour de Trump, c’est une très bonne nouvelle. C’est le match retour de la présidentielle, du bien contre le mal. C’est la vraie politique contre le divertissement. C’est plus facile qu’avec des pontes républicains», explique Jean-Éric Branaa. Avant d’ajouter: «c’est surtout le seul moyen de faire basculer les mauvaises tendances pour les démocrates. En s’invitant dans le jeu des élections de mi-mandat, Trump nationalise le débat autour de sa personne, qui reste un repoussoir. Résultat, cela pourrait permettre aux démocrates de perdre moins de sièges».
Tremplin pour Trump, level d’étape pour la majorité démocrate. Nul doute que le raout de dimanche sera par ailleurs scruté de près dans l’aile ouest de la Maison Blanche, où se trouve le bureau de Kamala Harris. En 2022, elle aussi sera dans les starting-blocks pour préparer l’échéance présidentielle de 2024.
Ce texte a été publié originalement sur le HuffPost France.